Sidiya Ndaté Yalla Diop était le fils de la reine Ndaté Yalla Mbodji et du Béthio Sakoura Diop, gouverneur du Walo occidental. Il fut au même titre que Lat Dior Ngoné Latyr Diop, El Hadji Oumar Tall, Samory Touré ou Alboury Ndiaye, l’un des plus grands résistants contre la colonisation au Sénégal, plus particulièrement au Walo.
Quelque temps après sa victoire sur Ndaté Yalla, Faidherbe s’empara de son fils, le prince Tedieck Sidya, qui n’avait que dix ans. Il l’emmena de force avec lui à Saint-Louis pour le faire scolariser à l’école des Otages des fils de chefs, et ainsi faire de lui un agent du colonisateur, comme cela était de coutume à l’époque. Parrainé par Faidherbe lui-même, le jeune prince Sidiya, major de sa promotion, fut baptisé Léon et envoyé, par la suite, en 1861, au Lycée Impérial d’Alger ».
Frappé par sa vivacité d’esprit et sa précocité, Faidherbe entreprit, avec sa détermination habituelle, de faire du futur souverain un étranger parmi ses sujets, un être humain totalement différent de celui qu’il était à sa naissance.
À l’école française, Sidiya Léon Diop se montra si brillant que Faidherbe n’hésite pas à l’inscrire au « Lycée Impérial » d’Alger. Mais la ville ne plaît pas à Sidiya et au bout de deux ans son puissant protecteur le fait revenir à Saint-Louis où il complète sa formation dans un établissement tenu par des religieux. Bien né et doté d’une intelligence supérieure, chouchouté par les colons et, diton, féru de stratégie militaire, Sidiya Léon Diop avait tout lieu d’être content de son sort. Croquant la vie à belles dents, il était tout à fait à l’aise dans les costumes, les manières, la nourriture et la langue des toubabs. Inutile de préciser que, formaté pour mépriser les siens, il ne s’en priva pas.
Il en fut ainsi jusqu’au jour où, lors d’un rassemblement public à Mbilor, le griot Madiartel Ngoné Déguene Mbaye refusa de chanter les louanges de Sidiya Léon Diop. Lorsque ce dernier voulut savoir pourquoi il se comportait ainsi, le griot lui répondit ceci : « Sidiya, je ne peux plus te chanter car je ne te reconnais plus, tu n’es pas habillé comme nous, tu n’agis pas comme nous et personne au Walo ne comprend les mots qui sortent de ta bouche !» Sans doute le Prince héritier du Walo se sentait-il déjà mal dans sa peau, car il reconnut sur-le-champ s’être fourvoyé et entama sa seconde métamorphose allant, dit-on, jusqu’à ne plus proférer un seul mot de français. Il renoua aussi avec la religion de ses ancêtres, se débarrassa du « Léon» dont son mentor l’avait affublé et redevint Sidiya Ndaté Yalla Diop. Pour Faidherbe qui s’était senti poignardé dans le dos, le revirement de son « fils adoptif» valait déclaration de guerre. Sidiya Ndaté Yalla finit par prendre les armes contre les successeurs de Faidherbe et leur imposa par ses succès militaires d’importantes concessions. Fait prisonnier à la bataille de Bangoye par l’armée de Lat Dior Ngoné Latyr venue en soutien aux forces coloniales, il fut exilé dans la forêt de Nengue-Nengue au Gabon. Sidiya y devint si populaire parmi les colons de l’époque que ceux-ci décidèrent de le faire rentrer au Sénégal à l’insu de l’administration française. Lorsque le Colonel Brière de Lisle apprit que le bateau le transportant avait accosté au port de Dakar, il monta à bord et lui fit savoir qu’il serait abattu à la seconde même où il en sortirait. Le même bateau le ramena au Gabon où il mourut en juin 1878 dans des circonstances non élucidées, alors qu’il n’avait pas encore trente ans.

